France, septembre 1996 > Septembre 1997Camille.
Je l'ai rencontré par hasard, lors de ma première semaine a Nice. Je marchais sur la promenade, admirant la vue tandis que le soleil se couchait. Des enfants jouaient sur la plage, leurs rires résonnaient quand une voix retentit. Fluide, limpide et pure. Plus rien n'avait d'importance ou n'existait. Juste cette voix, qui avait fait naître des frissons le long de mon épine dorsale tout en donnant a ma peau cette aspect « peau de poulet ». J'ai fermé les yeux, repris ma respiration qui avait été coupée un court instant et savouré la fin de la chanson.
Nothing else matters. Le titre parlait de lui même en cet instant. Cette voix qui me touchait aux tripes et faisait couler mes larmes...
Lorsque la chanson se fana sur les derniers accord de la guitare qui l'accompagnait, j'ai ouvert les yeux en souriant. Il se tenait a quelques mètres de moi, entouré de badaud et d'amis visiblement, mais son regard m'enveloppait.
Échange de sourire, hochement de tête et mon merci, murmure imperceptible avant de continuer ma route. Je ne voulait pas gâcher ce moment par des paroles superflues.
Le lendemain, mes pas m'ont ramenés au même endroit. Inconsciemment. Et il était la, seul cette fois. Nos regards ce sont croisés et il a commencé a chanter. Cette fois il entonnait
Wanted Dead or Alive, et un léger rire s’échappa malgré moi. Je resta la, l’écoutant pieusement. Et comme la veille, sa voix me toucha. Il enchaîna avec Livin' on a prayer et moi, statue bienheureuse, buvait religieusement ses paroles. Une foule s'amassait autour de lui, certain demandant un titre particulier. Et moi, toujours sur mon nuage de béatitude, reprit mon chemin. Sa voix m'apaisait, m'apportait une paix que je n'avait ressentie auparavant.
Ce rituel dura quelques semaines. Tous les soirs, j’allai l’écouter « prêcher sa parole divine ». Nous n'avions pas échanger un seul mot. Juste quelques regards et sourires. Rien de plus. Cela me suffisait. Il ressemblait a un ange. Auréole de cheveux blond cendré, des yeux bleux chaleureux, un sourire sincère. Athlétique, son corps était engoncer d'un pantalon de cuir assortie d'une veste de cuir noir et rouge ouvert sur son torse nu. La cicatrice qui barrait la gauche de son visage, je ne la remarquait même pas. Pour moi, il était juste parfait. Magnifique ange.
Puis un soir, je ne l'ai pas trouvé a « notre » endroit. Aucune trace. Après une heure, j'ai haussé les épaules et passé mon chemin en me trouvant ridicule. J’avais cru quoi, qu'un truc spécial se passait entre nous ? Alors que nous n'avions jamais parlé ? Connerie. Mais au fond de moi je savais deja, je ne voulait juste pas l'admettre. Je l'avait aimé a l'instant ou je l'avait entendu chanter. Il avait ravie mon cœur.
Le temps passa, je n’était pas retourné a cet endroit sur la promenade depuis une semaine, passant la plupart de mon temps avec mes amis. Je m'occupait, ignorant l’étau qui enserrait mon palpitant. Mais même cela ne m'aidait pas vraiment. Maxine, qui était devenue ma meilleure amie ne me lâchait pas, supportant mes états d’âme en yoyo. Elle m'aimait. Je le savait. On avait essayé, en vain et notre relation se transforma en grande complicité. Un soir mes amis décidèrent d'aller en boite et le point de rendez-vous fut fixé sur la promenade, face a Beau rivage. Cette endroit ou mon inconnu jouait généralement...
Anxieux, j’attendais. En tenue chic pour une nuit de folie. Je n'avait pas regarder s'il était la, je ne voulait pas savoir. Et soudain, une main saisit mon poignet. Je me retourna, riant déjà a l’idée que Maxine ne résistait jamais a la tentation de me toucher quand je me figea. Il ne s'agissait pas de mon amie, mais de mon ange.
« Hey, do u know why this street is so special ? » m'a-t-il demandé en serrant mon poignet. Moi, sans voix, sous le choc, je ressemblait a un poisson hors de l'eau.
Il a souris, m'a lâché et attrapant sa guitare, a commence a jouer.
« Because its where i meet you. » ajouta-t-il avant d’enchaîner ses premiers accords.
With or without you.Autour de nous, mes amis nous observait. S'interrogeant sur ce qui se passait. Moi j’étais ailleurs, dans le monde que Camille faisait naître en moi lorsqu'il chantait mais aussi, dans celui qu'il avait ouvert par ces mots.
One.Maxine, qui avait compris ce qui se passait, me sourit. Un clin d’œil après, elle avait poussé tout le monde pour aller en boite et nous laisser seul.
Mad World.Et nous, perdue dans notre dimension, captivé l'un par l'autre, nous chantions. Unissant ma voix rauque a la sienne pure, le contraste était saisissant. Et visiblement plaisant.
I'll be waiting.Des applaudissements rompirent le charme de ce duo. Camille remercia, salua la foule avant de me saisir la main et partir. Je le suivit.
Ce fut notre première nuit ensemble. Il m'emmena dans son studio. Nous avons parlé, rit, but, dansé, chanté, mangé avant de finalement s'embrasser, timidement. Il était mon premier homme, ma première histoire. Oh bien sur, je savais déjà que les femmes n’étaient pas ma préférence, Maxine en avait fait les frais, merci papa. Mais je n'avait jamais ressentit ce sentiment qui me liait a Camille et je voulais prendre mon temps. Et lui aussi.
Nous vécûmes les 10 mois suivant comme dans un rêve, parlant avenir, profitant de la vie. Son amour me donnait des ailes, et vice versa. Mais les siennes ont brûlé un soir d’août...
Comme a l’accoutumé, nous étions sur la promenade face a Beau-Rivage pour notre petit show-case ensemble. La foule était présente et ayant perdu la notion du temps, comme souvent, nous sommes restés bien trop tard. Il était environ 4 heures du matin quand une bande alcoolisée fit irruption autour de nous pour nous prendre a partie. Deux homos se donnait en spectacle, selon eux. Les insultes fusèrent, les quelques personnes se trouvant encore la disparurent bien vite et nous nous retrouvâmes seuls contre 6.
L'un de de la bande me bouscula, je lui rendit la pareille. Je n’était pas du genre a me laisser marcher sur les pieds. Cris, coups, insultes, intimidations. Dans mon dos, l'un des assaillants sortit un cran d’arrêt. Je ne le vit pas, mais Camille si, et il s’interposa afin de contrecarrer l'attaque qui m’était destiné. La lame trancha son artère carotide avant de se ficher dans mon flanc droit.
A la vue du sang sur le macadam, un tohu-bohu s'ensuivit, puis la débandade du groupe, en un instant nous fumes seuls. Des sirènes de police lointaine retentirent et moi, rampant dans notre sang mêlés, pour serrer Camille dans mes bras et lui ordonner de tenir bon.
Camille s'est éteint dans un sourire, après avoir difficilement balbutier qu'il m'aimait et depuis ce jour, ma vie a changé. Si nous n’étions pas rester aussi longtemps, si j’avais connu les gestes pouvant le sauver... Si...
Maxine fut celle m'ayant porté, m’accompagnant lors des funérailles, me serrant lorsque je me réveillait au milieu de la nuit pour appeler Camille. Un mois après, je lui disait adieu et rentrait en Russie pour débuter mes études en médecine.
Camille :
DA